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Photo du rédacteurSebastian Romero

Gare Saint-Jean, toujours un train de retard

Sous dimensionnée, mal agencée, insuffisamment desservie par les transports en commun, la gare Saint-Jean peine à accueillir de plus en plus de voyageurs. À l'heure où la métropole et la SNCF s'apprêtent à lancer un chantier de 100 millions d'euros, faisons un état des lieux de cette "belle anomalie" bordelaise.


Une gare à dimension européenne

Mais qu’est-ce qu’elle est belle et monumentale notre gare Saint-Jean !


Mise en service en 1855, inscrite aux monuments historiques, avec sa belle verrière (la plus grande du monde lors de sa construction, maintenant d’Europe), sa grande carte ferroviaire peinte dans le Hall de départ, son parvis pavé avec ses lampadaires design…


Tout cela rénové en 2017, avec l’ajout d’un nouveau hall et de parkings côté Belcier.


Une gare à dimension européenne qui accueille la LGV reliant Bordeaux-Paris en 2h04, au sein de l’Opération d’Intérêt National Bordeaux-Euratlantique visant à créer d’ici 2030 (reconduite jusqu’en 2040) un quartier mixte avec bureaux, logements, espaces verts et commerces.


 Il y a à peine sept ans, c’est comme si c’était hier !


Une forte fréquentation attendue… mais déjà largement dépassée!


La fréquentation de la gare, augmente, et c’est peu de le dire…


En 2022, ce ne sont pas moins de 26,36 millions de personnes s’y sont rendues. Ce qui était prévu pour 2030 !


Bien au-delà des prévisions initiales donc, elle est aujourd’hui la 3ème gare de province derrière Lyon Part Dieu et Lille Flandres (qu’elle devrait bientôt dépasser), et devant Paris Austerlitz.


La fréquentation a augmenté de 21% entre 2019 et 2022, et elle devrait encore s’accroitre fortement pour atteindre les 34 millions en 2030

La fréquentation a augmenté de 21% entre 2019 et 2022, et elle devrait encore s’accroitre fortement pour atteindre les 34 millions en 2030 selon les prévisions de Gare et Connexions.

Dans à peine 6 ans, c’est comme si c’était demain !


L'arrivée de la LGV Bordeaux/Dax et Bordeaux/Toulouse (autrement appelé GPSO) participera à cette hausse, tout comme, dans une moindre mesure, le RER métropolitain.

Le train, un des moteurs de la décarbonation des déplacements, est plébiscité par les français et par les politiques publiques, mais comment le rendre plus attractif avec des accès et une desserte aussi problématiques…


Des difficultés d’accès


Le vendredi 12 avril 2024, les élus de la Métropole ont validé l’étude de faisabilité du réaménagement des accès à la gare et le « plan-guide » qui « vise à garantir l’accessibilité de tous les modes à la gare, à améliorer la performance intermodale et le confort des usagers » d’ici à 2030.


Gérard Chausset : « le talon d’Achille de la gare : elle est sous desservie par les transports en commun, il y a une sous capacité que nous devons gérer. C’est une inquiétude sur le futur. »

Parmi les actions prévues : la réorganisation du stationnement des vélos, l’amélioration de la desserte par les bus et les cars, la végétalisation du pôle, la création de lieux de vie et la pacification de la rue Charles Domercq.


Gérard Chausset : « le talon d’Achille de la gare : elle est sous desservie par les transports en commun, il y a une sous capacité que nous devons gérer. C’est une inquiétude sur le futur. »


Dans un récent article de Sud-Ouest (voir lien) plusieurs élus locaux nous délivrent leur proposition ou vision sur les améliorations possibles :


Gérard Chausset : « le talon d’Achille de la gare : elle est sous desservie par les transports en commun, il y a une sous capacité que nous devons gérer. C’est une inquiétude sur le futur. »


Christophe Duprat, rappelant qu’un TGV OUIGO c’est 1200 personnes d’un coup souhaite « déplacer de quelques mètres la station de tram ».


Quand d’autres souhaitent rééquilibrer le flux vers le hall coté Belcier.


Le hall Belcier n’accueille que 15% des flux voyageurs, on peut que déplorer que des emprises plus importantes n’aient pas été anticipées de ce côté-là de la gare, mais il n’a pas été prévu d’élargir la rue des Terres de Borde…


Nous devons aujourd’hui faire avec, mais y basculer de nouvelles lignes de bus, avec les correspondances potentielles de l’autre côté de la gare comment cela pourrait fonctionner correctement… et de manière lisible pour les voyageurs. Alors que dans cette « petite rue », il y a les bus, les cars « macron », les voitures… Et que cela coince déjà.


On est bien loin du pôle multimodal qu’on pouvait espérer…


Une desserte en transport en commun déficiente

Notre association alerte de nombreuses années sur « l’anomalie » que constitue la desserte en transport en commun de la gare Saint-Jean, sur la saturation annoncée, et aggravée par le futur RER métropolitain.


Alors qu’un nouveau projet de réaménagement se profile, les solutions évoquées semblent être, une fois de plus, largement insuffisantes…


Une des principales gares françaises, et la première gare régionale, Bordeaux Saint-Jean, n’est desservie en transports en commun que par une ligne de tramway... et des bus

Une des principales gares françaises, et la première gare régionale, Bordeaux Saint-Jean, n’est desservie en transports en commun que par une ligne de tramway (la D n’étant qu’une branche de la C), et par des bus. Il est prévu la desserte prochaine par une ligne de bus express dont on connait par avance les limites, tant en capacité, qu’en efficacité (voir notre article à ce sujet).


Lille Flandres, dont la fréquentation est comparable à Bordeaux Saint-Jean pour 2022, est desservie par 2 lignes de métro, 2 lignes de tramways, et 4 lignes de BHNS.


Et la fréquentation de la gare de Bordeaux va elle encore être accrue par le RER métropolitain, ainsi que par le GPSO (LGV vers Toulouse et Dax).


Toulouse, Lyon, Rennes sont déjà ou seront prochainement desservies par deux lignes de métro alors que pour deux d’entre elles, la fréquentation de la gare est bien moindre que celle de Bordeaux.


Les transports en communs assurent aujourd’hui 55% de la desserte de la gare, mais ils sont une fois de plus les grands oubliés…

Alors les études en cours sur le réaménagement et les discours sont-ils à la hauteur des enjeux ?


Les transports en communs assurent aujourd’hui 55% de la desserte de la gare, mais ils sont une fois de plus les grands oubliés…


Pas de nouveau projet de desserte, basculement du réseau bus d’un coté ou de l’autre de la gare, scinder la « gare routière » (parlons-en après…) en deux… Déplacement de la station tram de quelques mètres ne sont que des rustines qui ne changeront pas grand-chose au problème.


Et concernant les rustines, nous avons déjà été largement servis ces dernières années... Terminus partiels, lignes de bus express, augmentation de la fréquence des Batcub.


Et le métro alors ?

Nous ne pouvons plus nous en remettre à l’espérance pour que tout cela ne craque pas.


On peut s’étonner que le métro, dont l’étude est toujours en cours (et dont nous savons à présent que les deux corridors encore en lice passent par la gare St-Jean), n’est pourtant mentionné par aucun élu comme une des solutions à cette problématique d’accès et desserte.


Ce dernier pourrait pourtant faciliter grandement l’accessibilité de la gare pour nombre de métropolitains, ainsi que l’accessibilité de la métropole pour tous les passagers descendant à Bordeaux.


La fréquentation de la gare a plus que doublé en quelques années, et le réseau de transport en commun pour la desservir? Rien ou presque.

Vous voyez le bazar devant la station de tram au moindre train qui arrive… Un tram c’est 6600 voyageurs par heure et par sens, un métro quant à lui c’est 15360 voyageurs par heure et par sens !


La fréquentation de la gare a plus que doublé en quelques années, et le réseau de transport en commun pour la desservir? Rien ou presque.


Le métro par sa fréquence et sa capacité permettrait d’absorber le flux voyageurs avec bien plus de fluidité et de rationalité qu’aujourd’hui

Une station de métro (sur l’emprise du parking souterrain actuel par exemple) permettrait de réaménager l’espace et les flux souterrains de la gare, et d’éviter la congestion que nous connaissons en surface.


Le métro par sa fréquence et sa capacité permettrait d’absorber le flux voyageurs avec bien plus de fluidité et de rationalité qu’aujourd’hui (le réseau de bus étant lui-même réadapté à cette nouvelle donne).


Le parvis et les abords de la gare pourraient alors être apaisés, davantage végétalisés et l’accès à la gare des mobilités douces amélioré.


Le projet de transformation de la gare doit tenir compte de cette option, sauf à tout refaire d'ici moins de 10 ans (encore…).


Une gare routière inexistante


En parallèle de l’arrivée de la LGV, c’était il y a 7 ans aussi, le début des cars dits « Macron ».

Leur succès est immédiat : Flixbus, Blablabus, etc… Et toujours en croissance avec plus de 10 millions de passagers en France en 2022. Des millions de nouveaux passagers, séduits par ce mode de transport souvent plus économique que le train, plus écologique que la voiture.


Bordeaux fait naturellement partie des 10 principales dessertes de France avec une fréquentation allant jusqu’à 1 million de passagers (rapport 2022 de l’Autorité de Régulation des Transports).


Illisible, peu confortable, pas de toilettes, pas d’affichage des bus en arrivée les correspondances etc, c’est parfaitement indigne d’une métropole européenne

Comment alors expliquer là aussi que, contrairement aux métropoles comparables, elle ne dispose pas d’un équipement adéquat nommé « Gare routière » permettant l’accueil, l’abri, le confort, la satisfaction de ces nombreux passagers. Ces derniers sont-ils indésirables ? Relégués au fil du temps du parking Descas (détruit depuis), puis aux abords de la gare Belcier, pour maintenant être scindés en deux lieux suivant la compagnie, mais quel bazar !


Illisible, peu confortable, pas de toilettes, pas d’affichage des bus en arrivée les correspondances etc, c’est parfaitement indigne d’une métropole européenne (certaines villes moyennes de pays moins développés sont bien mieux loties…).


Alors là aussi on aurait pu rêver que cela soit anticipé… Mais en plus de ne pas avoir été anticipé, 7 ans après l’arrivée de ces cars « Macron » Bordeaux ne dispose toujours pas d'une gare routière !


Alors l'heure où nous rédigeons cet article un communiqué de presse du projet “grande gare de Bordeaux” indique qu'une gare routière doit être construite côté belcier, proche du pont de la palombe, ce plan devant être mis en œuvre d'ici 2030… Nous attendons plus de précisions.


En voiture…

Ce n’est guère mieux : changement de plan de circulation, réduction de voie, travaux, un quartier en croissance avec de nouveaux habitants qui se déplacent, bouchons, dépose-minute mal identifié, se rendre à la gare Saint-Jean en voiture est un véritable parcours du combattant…


Qu'en conclure…?

Si on peut attendre de ce plan guide qu’il puisse proposer quelques améliorations par rapport à la situation actuelle, on ne peut que regretter que Bordeaux métropole n’ait jamais un coup d’avance en matière de mobilité, pour ne pas dire 10 ans de retard.


Le projet actuel de transformation du parvis ne peut se concevoir sans y inclure la potentielle future station de métro qu’envisage l'étude en cours. Sauf à tout refaire encore d'ici quelques années.


Il est heureux cependant que ce projet de requalification prenne plus d'ampleur qu'initialement acté.


Des besoins non anticipés, des capacités mal calibrées, des accès problématiques, Bordeaux Saint-Jean est le parfait révélateur de l’égarement des politiques de mobilité dans la métropole.




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