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Photo du rédacteurMickaël Baubonne

L'impasse du RER sans métro

Gérard Chausset, élu de Mérignac, s'est exprimé en faveur du déploiement d'un réseau de RER sur la ceinture ferroviaire. Cette idée pourrait s’avérer excellente si seulement elle s’appuyait sur un réseau de métro. Mais, pour cet élu, le RER doit se contenter de tourner autour du cœur de la Métropole au lieu de le traverser. Ce projet présente plusieurs lacunes. Analyses.


La tranchée de Talence :

Une infrastructure encombrée !

Le RER sans métro imaginé par Gérard Chausset s'appuie sur la "tranchée de Talence". Il s'agit d'un ouvrage dans lequel ont été insérées deux voies ferrées entre le sud de la gare Saint-Jean à Bordeaux et la gare de la Médoquine à Talence.



Pas de place pour un véritable service de RER

Sur ces voies circulent des trains de fret, des TER, des TGV. En 2005 déjà, Réseau ferré de France faisait observer que la capacité pratique maximale de l'infrastructure était quasiment atteinte avec 150 trains par jour. Dans ces conditions, l'utilisation de la tranchée de Talence pour développer une offre de RER dans la Métropole s'avère impossible. Les quelques trains qui pourraient encore être ajoutés chaque jour offriraient plutôt un service de TER amélioré, tout en empêchant le développement du fret ou du trafic national. L'implantation d'une halte ferroviaire nouvelle à la Médoquine sur cet axe encombré ralentirait par ailleurs le trafic ferroviaire et causerait une dégradation des conditions d'exploitation.

Conscients de l'encombrement de la tranchée de Talence, les experts de l'École polytechnique de Lausanne s'accordent à dire que des aménagements ferroviaires au sud de Bordeaux sont nécessaires pour faire face à une augmentation du trafic ferroviaire. C'est l'un des arguments avancés pour justifier la création de nouvelles LGV en direction de l'Espagne et de Toulouse : ces LGV permettraient de détourner le trafic TGV de la tranchée de Talence, qui serait dès lors réservée aux TER, au trafic péri-urbain ainsi qu'au fret. Ce même argument a également été avancé pour justifier la création d'un contournement ferroviaire de Bordeaux : TGV et fret seraient détournés de la tranchée de Talence, qui serait dès lors réservée aux seuls TER/RER.

Les quelques trains qui pourraient encore être ajoutés chaque jour offriraient plutôt un service de TER amélioré.

La capacité limitée de la tranchée de Talence a d'ailleurs convaincu M. Chausset à défendre cette idée d'un contournement ferroviaire. Il est incompréhensible de voir ce même élu affirmer aujourd'hui qu'un RER seul utilisant la tranchée de Talence est tout à fait possible, sans aucune réserve.


Le doublement des voies : une solution très coûteuse

Il pourrait être envisagé de doubler le nombre de voies dans la tranchée de Talence. Cela supposerait cependant de réaliser des travaux lourds et coûteux dans un milieu contraint.

Il faudrait en effet reprofiler la tranchée au prix d'un certain nombre d'expropriations et d'interruptions du trafic ferroviaire. SNCF Réseau estime à 45 millions d'euros du km l'ajout de 2 voies en milieu urbain dense. Puisque, à Talence, les travaux seraient plus lourds encore (reprofilage d'une tranchée en milieu urbain très dense), il est plus que probable que les coûts s'envoleraient.

Cela supposerait de réaliser des travaux lourds et coûteux dans un milieu contraint.

Selon RFF les aménagements nécessaires au sud de Bordeaux devaient représenter un investissement de 1 milliard d'euros ! Se pose alors la question de savoir s'il est préférable d'investir dans le doublement de la tranchée de Talence ou dans la réalisation d'un réseau de métro-RER.


Le métro-RER : le mix gagnant

Le projet de métro-RER permet de court-circuiter la tranchée de Talence pour proposer des liaisons péri-urbaines efficaces et fréquentes sans impacter le trafic ferroviaire classique. La ligne M1 emprunte ainsi la ceinture ferroviaire entre Ravezies et la Médoquine. La ligne M2 emprunte également la ceinture ferroviaire entre Bourranville et Pessac centre. À chaque fois, la tranchée de Talence n'est pas utilisée pour éviter toute dégradation du service rendu à cause de l'encombrement de l'infrastructure.

Grâce au métro, les habitants des première et deuxième couronnes de l'agglomération pourraient ainsi se rendre rapidement non seulement dans des gares périphériques mais aussi au coeur de l'agglomération. La fréquence pourrait être ajustée à l'état de la demande car l'ouest de la ceinture ferroviaire est sous-exploité, contrairement à la tranchée de Talence. En outre, des RER venant d'Arcachon pourraient également être détournés de la tranchée de Talence pour démultiplier les destinations accessibles sans rupture de charge aux habitants du Bassin. Les avantages du métro sont donc nettement supérieurs à ceux d'un doublement de la tranchée de Talence.

Le projet de métro-RER permet de court-circuiter la tranchée de Talence pour proposer des liaisons péri-urbaines efficaces et fréquentes sans impacter le trafic ferroviaire classique.

Projet métro+RER

Un RER est une bonne chose, mais il doit nécessairement s'appuyer sur un métro. À défaut il ne s'agirait que d'un projet a minima ne répondant pas aux défis considérables auxquels la Métropole doit faire face.



Le danger d'un réseau à 2 vitesses !

Un RER sans métro, c'est un réseau à deux vitesses qui se dessine : un RER rapide, confortable et capacitaire en périphérie, le tramway lent et saturé au centre. Le RER seul faciliterait considérablement les déplacements en périphérie. Les usagers y bénéficieraient de rames confortables et rapides. Au contraire, la situation des déplacements au coeur de la Métropole resterait inchangée. Ce secteur continuerait d'être structuré autour du tramway, qui présente des problèmes de capacité, de rapidité et de fiabilité. Pis encore, le RER seul rendrait le centre plus accessible depuis la périphérie au prix de correspondance à Arlac (tram A), à Pessac (tram B), à la Médoquine (liane 8). L'accès à l'hypercentre ne se ferait par ailleurs que via la gare Saint-Jean (tram C).


Projet de Gérard Chausset

Ces correspondances ajouteraient de nouveaux usagers sur des infrastructures centrales souvent saturées. Le RER sans métro n'est donc qu'une réponse partielle aux déplacements périphérie-périphérie et n'apporte rien aux déplacements centre-périphérie et centre-centre.

Un RER sans métro, c'est un réseau à deux vitesses qui se dessine : un RER rapide, confortable et capacitaire en périphérie, le tramway lent et saturé au centre.

Au contraire, le RER, lorsqu'il se greffe sur le réseau de métro, permet de démultiplier les destinations périphériques et centrales. Le centre comme la périphérie bénéficient alors d'un réseau rapide et performant, complété par le tramway pour des dessertes plus fines et pour des distances plus courtes. Toute la Métropole est ainsi concernée par les améliorations liées à la mise en place d'un métro-RER.

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