Contribution de l'association "Métro de Bordeaux"
-Projet d'amélioration de la desserte en transport en commun de la zone aéroportuaire de Mérignac-
Parce qu'un métro n'est rien sans un réseau cohérent en soutien, l'association "Métro de Bordeaux" livre sa contribution au projet d'amélioration de la desserte en transport en commun de la zone aéroportuaire
1 – Présentation, contexte et premier contact
2 – Opportunité du projet
3 – Extension en branche de la ligne de tramway A
4 – Bus à Niveau de Service Performant
5 – Parc relais
6 – Remarques diverses et conclusion
1 – Présentation, contexte et premier contact
L’association « Métro de Bordeaux », Association loi de 1901, a vocation non seulement à promouvoir la construction de lignes de métro sur la métropole bordelaise afin de pallier les déficiences des transports urbains actuels, mais également pour but de participer à l’élaboration d’un réseau de transport multimodal polyvalent, cohérent et efficace.
L'aéroport de Bordeaux Mérignac a dépassé les 6 millions de voyageurs en 2017, et la mise en service de la LGV ne fait que légèrement ralentir la croissance du trafic. Dépasser les 7,5 millions de voyageurs à l’horizon 2021 n’est pas inenvisageable.
De plus, la zone desservie est le plus gros bassin d'emploi de la métropole hors Bordeaux. Les activités dans cette zone sont variées : Bureaux, commerces de gros et de détail et industries. Il est à noter que de nombreux sites industriels accueillent des poids lourds de façon régulière.
Du point de vue trafic automobile, cette zone est saturée aux heures de pointe en semaine, mais également le samedi dans la zone intra rocade en raison de l’importante zone commerciale.
Au premier abord, la vision d’artiste présentée sur la page de garde du document est préoccupante. En effet, les voies de circulations particulièrement étroites et l'absence de bordure sécurisant la piste cyclable rendent les conflits poids lourds/cyclistes particulièrement dangereux pour ces derniers. La zone aéroportuaire et les industries environnantes accueillant de nombreux bus et camions, ces conflits d'usages ne seront pas anecdotiques : nous vous rappelons qu'un cycliste est décédé l'an dernier avenue de Beaudésert suite à une collision avec un camion. (A noter toutefois que les bordures continues protégeant la piste cyclable telles que celles installées avenue de Magudas entrainent des problèmes de circulation pour les véhicules d'urgence, ainsi que des défauts dans l’évacuation des eaux pluviales.)
2 –Opportunité du projet
Concernant la section rappelant l’opportunité du projet, nous remarquons que les principales critiques relevées dans l'état des lieux des TC sont l'absence de fiabilité des temps de parcours, la rupture de charge et le manque de lisibilité.
Nous tenons à souligner que ces travers resteront hélas d’actualité avec le projet actuel :
Fiabilité des temps de parcours : Le tramway bordelais souffre de problèmes chroniques de fiabilité (voir en particulier la section Victoire-St Nicolas de la ligne B mais aussi la section centrale de la ligne A). Le fait de réaliser une aussi longue section en VU amplifie l'impact d'une éventuelle panne. De même, cette section en VU imposera des temps d'attente significatifs en station à la moindre désynchronisation des rames causée par le retard d'une d'entre elles, entrainant des retards en cascade sur toute la branche.
Rupture de charge : La liaison Aéroport-Gare St Jean, actuellement directe via la navette, comprendra obligatoirement une correspondance dans le projet.
Manque de lisibilité : Quel sera le moyen ressenti par l’usager comme le plus efficace pour rejoindre la gare St Jean ? - La solution préconisée dans ce projet, c’est à dire bus vers la halte ferroviaire de Pessac-Alouette, puis TER (toutes les ½ heure en général) ? - La solution tram A jusqu’à la halte ferroviaire de Mérignac Arlac puis TER ? - La solution n’utilisant que le tant vanté tramway (A + C) avec changement au milieu de la ville ? La lisibilité de cette liaison est donc pire qu'avec la navette actuelle.
3 – Extension en branche de la ligne de tramway A
Concernant la prolongation de la ligne de tramway, de nombreux éléments sont préoccupants.
Tout d’abord, la bifurcation pour desservir le centre commercial Carrefour est discutable :
Pour rappel, le tramway bordelais reçoit déjà de nombreuses critiques pour ses tortillements, en particulier celui visant à desservir au plus près le CC Mériadeck (c'est à dire devant l'entrée du centre commercial), qui sont tenus pour responsables de la faible performance de la ligne A.
De plus, la distance entre l'arrêt prévu et la plus proche entrée du centre commercial reste importante (>250m) étant donnée la traversée du parking de ce dernier.
Enfin, le virage à 90° entre Somme et Matosinhos aura un impact significatif sur les performances et l'usure du matériel, ainsi que sur le confort des voyageurs.
En résumé, cette bifurcation apporte de nombreux inconvénients pour un gain mineur. En comparaison, en faisant circuler le tramway sur l'avenue JF Kennedy avec un arrêt situé à l'intersection du chemin de Pouchon :
- La distance à parcourir pour rejoindre la plus proche entrée du CC est d'environ 100m supérieure à celle du projet - Les coûts de construction et d'entretien de la voie et des matériels roulants sont réduits, - Les performances générales de la ligne, en particulier la vitesse commerciale, sont améliorées significativement.
Nous tenons à rappeler que, contrairement à une ligne de bus, la construction d’une ligne de transport lourd comme un tramway est un engagement sur plusieurs décennies, et aucun subside de la part de la direction du CC ne pourrait justifier de sacrifier l'efficacité d'une ligne sur une telle durée.
Bien que de nombreuses critiques soient faites concernant la distance interstation faible sur les lignes historiques, il semble que ce projet plonge dans l’excès inverse : La distance interstation varie entre 900m (4 chemins-CC) et 1,35 km (Chemin long-Acacias).
Créer une station supplémentaire au niveau du futur centre des congrès (en face de l'actuel restaurant du personnel de l’aéroport) et décaler la station acacias vers le rond-point entre l'allée des Acacias et l'avenue Kennedy permettrait d’affiner la desserte, de rapprocher l’arrêt Acacias du futur parc relais et surtout d'ajouter un point de croisement supplémentaire pour les tramways.
En ce qui concerne les schémas d’insertion du tramway, les deux propositions sont assez surprenantes sur le fait qu’elles hypothèquent considérablement l’évolutivité possible de la ligne.
Dans le cas de l’insertion du tramway par voie axiale, il serait préférable de ne pas symétriser les îlots plantés. Un îlot de 3,52 m d'un côté et de 0,5 m de l'autre permet de réserver une emprise éventuelle afin de doubler la voie si cela se révèle par la suite nécessaire sans être contraint de déplacer la voie actuelle, minimisant par-là les coûts ultérieurs pour un investissement initial additionnel nul par rapport au projet actuel.
Même en l'absence de doublement, la bande verte de 3,52m pourra accueillir des végétaux autrement plus significatifs que les deux petites bandes prévues.
Dans le cas de l'insertion latérale, le fait de focaliser les circulations douces sur le côté opposé à la plateforme du tramway sous-entend que ces circulations sont du côté ou se situent majoritairement les intersections et les accès riverains, entrainant des risques significatifs pour ces usages faiblement protégés, risques qui inciteront les cyclistes à plutôt emprunter, pour des raisons d’apparente sécurité, la voie de tramway ou le trottoir adjacent à cette dernière, tel que cela se passe systématiquement dans le reste de la ville. Il serait plus pertinent d'installer la piste cyclable de l'autre côté afin de minimiser le nombre de coupures. De plus, les espaces verts prévus dans ce cas, situés à l'opposé de la voie de tramway, ne permettent pas de réserver des emprises pour un passage ultérieur en double voie si nécessaire.
4 – Bus à Niveau de Service Performant
La liaison BNSP quant à elle semble être le parent pauvre du projet, malgré son objectif affiché d’améliorer la desserte Aéroport-Gare en plus de couvrir également une grande partie de l’Aeroparc et de Pessac Bersol tout en assurant une liaison transversale avec un des pôles majeur du CHU et la correspondance avec deux lignes de tramway.
Au vu de sa description générale, ce bus empruntera essentiellement des voies banalisées (d'où l'intérêt du néologisme BNSP, ne pouvant décemment se targuer de l'appellation BHNS). Les rares sections en site propre se situent dans un endroit où elles ne sont pas forcément nécessaires (au sein même de la zone aéroportuaire).
L'absence de voie dédiée ou semi dédiée (Co-voiturage, taxis, circulations douces) sur les nombreux axes qui disposent encore d'un potentiel d'élargissement significatif (Rue Toussaint Catros, avenue Marcel Dassault, rue de Beaudésert, avenue Roland Garros, avenue du Haut-Lévêque) est une erreur regrettable, en particulier sur les premiers axes cités au vu du prévisible développement de la zone Aeroparc qui fera disparaitre ces opportunités. De plus, il est notable que les carrefours de ces voies sont déjà considérés saturés ou en limite (voir le chapitre 7.6.5.3 « conditions de circulation »). De façon plus générale, aucun aménagement cyclable n'est prévu sur cette zone malgré sa dangerosité prouvée. Ce point est toutefois à relativiser, des aménagements étant actuellement en cours de construction dans la zone.
Aussi, nous aimerions noter que la vantée priorité aux feux de signalisation est sans objet sur la section entre Le Haillan-Rostand et la sortie 13 de la rocade (soit les 2/3 de son trajet), étant donné que cette section ne comporte strictement AUCUN feu de signalisation.
Etant donné la circulation sur les axes empruntés, nous nous interrogeons sur la vitesse commerciale prévue (22 à 25 km/h), qui semble être une moyenne intégrant la portion supposée à 70 km/h sur la rocade. Le respect d’une telle vitesse commerciale aux heures de pointe semble douteux.
Enfin, l'intérêt d'un rond-point supplémentaire au niveau de l'avenue Becquerel et de la rue de Beaudésert (voir planche 7) est discutable. Les ronds-points sont de manière générale de plus en plus décriés comme étant particulièrement dangereux pour les cyclistes.
5 – Parc relais
Le nouveau parc relais « Acacias » est une idée curieuse et ne répondant pas à un besoin réel.
Tout d’abord, quel est le but d’un parc relais ? Permettre aux automobilistes et autres usagers de la route de se garer à proximité d’un point d’échange avec les transports en commun afin d’utiliser ces derniers pour rejoindre leur destination réelle, située dans une zone dans laquelle l’usage de la voiture n’est pas souhaitable.
Dans ce cas, la pertinence même de ce parc relais est à remettre en cause : il se situe précisément dans une zone qui contient de nombreuses destinations finales pour les personnes transitant actuellement dans la zone.
De plus, même pour ceux souhaitant prendre les transports en commun pour remonter vers Bordeaux, quel est l’intérêt de les inciter à se diriger et se garer dans une zone où la circulation est notoirement saturée ?
Enfin, comment pouvoir se vanter d’un report modal de 1200 véhicules grâce aux nouvelles lignes tout en attirant 250 véhicules supplémentaires dans cette zone ?
En revanche, un parc relais excentré, situé dans une zone moins tendue le long de la ligne de BNSP serait plus pertinent. Un emplacement potentiel serait, par exemple, le terrain situé au niveau de la sortie 12, entre la rocade et la clinique du sport, sous la ligne haute tension. Bien entendu, cela implique une circulation efficace du BNSP, et donc un passage en voie dédiée au minimum jusqu'à l’aéroport. Une autre solution (à long terme au vu des difficultés technique et légales prévisibles) serait un parc relais en liaison directe avec l'A63 proche du terminus de la ligne à Pessac Bersol.
6 – Remarques diverses et conclusion
Nous aimerions vous signaler que la section concernant la restructuration du réseau TBM (section 5.10) omet de préciser la suppression d’une des branches de la liane 11 (disparition visible sur le schéma joint).
Pour clôturer cette participation, nous trouvons la description des différents scenarios envisagés intéressante.
Il est à noter que les scénarios sous estiment le temps d’attente sur la liaison Aéroport – Gare St Jean en ne tenant pas compte de l’attente en gare de Pessac Alouette (½ heure en général dans l’état actuel du réseau TER). De plus, il y a potentiellement un problème de cohérence entre la fréquentation actuelle des TC existants (Liane 1 en particulier - 22000 passagers par jour), la fréquentation attendue sur le tramway (moins de 5000 passagers/jour) et le report modal espéré (1200 véhicules en moins, soit au minimum 20% des passagers envisagés sur les lignes tram + BNSP). En l'absence de données publiques concernant la fréquentation de la section 4 chemins-Aéroport de la liane 1, il est toutefois difficile de caractériser le problème. En conclusion, l’extension de la ligne de tramway, bien que surdimensionnée par rapport aux besoins actuels (tout en étant toutefois plus fréquentée que la plupart des autres extensions récentes), reste compréhensible pour des raisons d’image et d’optimisation des liaisons. Toutefois, au vu des nombreux projets dans la zone, aussi bien résidentiels, touristiques, industriels et commerciaux, il nous semble dangereux de volontairement réduire la performance de la ligne par des détours peu utiles et d’hypothéquer l’avenir en restreignant l’évolutivité à moyen-long terme du projet à cause d’une conception initiale rendant le doublement de la ligne prohibitif alors que des adaptations mineures réduisant significativement ce coût n’auraient aucun impact ni sur le budget initial du projet, ni sur sa qualité.
Quant au BNSP, l’utilisation d’un néologisme pour masquer le fait qu’il ne s’agisse que d’un bus banal soumis aux aléas du trafic sur une portion importante de son trajet, portion qui est de plus la zone la plus notoirement saturée, ne trompera personne et, sans adaptations significative, ne remplira aucunement ses objectifs d’assurer une liaison efficace Aéroport-Gare St Jean.
Enfin, pour optimiser les liaisons entre Aéroport-Gare St Jean, la solution préconisée à moyen-long terme par notre association reste bien sur une liaison Aeroport-Arlac, puis métro jusqu’à la gare St Jean. De plus, cette solution rapproche l’intégralité de la ville de l’aéroport (voir les temps de parcours).
Association « Métro de Bordeaux », 24 Octobre 2018.
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